5 octobre 2011

Munch : les vibrations de l'angoisse



"L'angoisse est le vertige de la liberté"
Sören Kierkegaard



Je me souviens avoir vu adolescente ce tableau sur la jaquette d'un livre. J'ai oublié le nom du livre mais j'ai gardé en mémoire l'effroi que suscite "le cri" de Munch. C'est comme s'il existait une connexion directe entre la vue et le sang : il se glace immédiatement. Cela s'appelle la synesthésie ou la correspondance des sens. 

C'est le talent de l'artiste que de savoir partager son monde à travers ses créations. Certes, il s'agit chez Munch d'un univers de peur et d'angoisse. Qui voudrait partager une telle atmosphère ? J'ai pourtant pris grand plaisir à regarder avec curiosité la cinquantaine d’œuvres présentées au Centre Pompidou moi qui avoue un penchant pour l'allégresse et la légèreté en peinture. 

"Le cri" n'était pas exposé. Grande déception. J'attendais de ma confrontation avec la toile de percer le mystère. Je fais partie de ceux qui pensent que regarder longtemps, attentivement une photo ou une toile, permettra d'en connaître les secrets. Comme l'exprimait Magritte dans son fameux tableau "Ceci n'est pas une pipe", l'image est un signe mis à la place de l'objet. Ils ne se confondent pas.


Ce qui me fascine chez Munch ce n'est pas l'angoisse mais sa capacité à créer une ambiance hypnotique. Si vous regardez "Le cri" -et c'est le cas pour d'autres des ses œuvres- les mouvements du pinceau suggèrent des ondes. Munch est contemporain de la découverte des rayons x (sonder les corps),  de l'émergence de la psychanalyse (sonder les âmes) et des théories qui avancent que des ondes imperceptibles permettraient la communication des corps et des esprits (sonder l'invisible). Preuve si il en est qu'on échappe difficilement à l'influence de son époque.

"Le cri" représente l'expérience littérale d'une crise d'angoisse. Munch disait à propos de ce qui lui inspira le tableau : "Je marchais sur la route avec deux amis -le soleil se couchait- je sentis comme une bouffée de mélancolie. Le ciel devint soudain rouge sang- Je m'arrêtai, m'appuyai à la barrière, las à en mourir- , je vis les nuages flamboyant comme du sang et une épée - la mer et la ville d'un noir bleuté -(...) je restai là frissonnant d'angoisse - et je sentis comme un grand et interminable cri traversant la nature."

Pas facile de faire face à la condition humaine mais quelle chance d'être un artiste.



"Toute angoisse est imaginaire, le réel est son antidote."
André Comte-Sponville
 

Edvard Much. L'oeil moderne
Centre Pompidou, Paris
21 septembre 2011- 2 janvier 2012

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire